Gérald Genty

Qui connait Gérald Genty depuis ses débuts l’identifie sans doute par son goût prononcé pour les jeux de mots, qui n’éclipse pas pour autant un certain talent mélodique. Cela reste pertinent aujourd’hui, mais pour le moins réducteur au regard du virage amorcé en douceur avec son précédent album Là-haut (2019). Virage, ou ascension plus exactement, décollage même. Vers les cieux, le podium ou l’au-delà ? Sans doute un peu des trois.

Les grands espaces, le sport et... la mort traversaient déjà son précédent album comme autant de lignes de forces : on les retrouve aujourd’hui sur ce nouvel effort, Marchons sur Mars. Continuité ? Oui et non.

Certes, c’est encore l’ingé son Thomas De Fraguier aux manettes comme sur les deux précédents disques. Mais le fan d’arrangements qu’est Gérald s’est laissé tenter cette fois par l’expérience de l’enregistrement presque live. Il fallait déjà le bon endroit pour cela : le choix s’est porté sur le studio Coxinhell à Fréjus, situé tout en bord de mer, mais bien loin de la Manche où réside désormais l’artiste. Il fallait ensuite un casting à la hauteur. On retrouve donc aux claviers le complice habituel de ces dernières années sur scène et sur disque, le tout-terrain Julien Carton (Matmatah, The Voice, Sophie Hunger...). Nouveau venu à la basse tout aussi solide,Benjamin Glibert (Aquaserge, Hyperclean, Forever Pavot...). Enfin, pour une des cartes blanches annuelles que lui offre la Dame de Canton, Gérald avait ponctuellement invité à la batterie celui qu’il qualifie de « son idole » : Mathieu Boogaerts, qui accepte de jouer sur ce nouvel album, ou du moins, avec humilité, de « passer le casting ». Réussi haut la main bien entendu, pour le plus grand plaisir de Gérald.

« Ce disque est peut-être le moins joueur mais le plus joué » explique-t-il, « dans le sens où j’ai moins trafiqué les sons, multiplié les pistes de voix, de zigouigouis étranges, mais au contraire, essayé de faire jouer plus ‘organique’, parfois même sans clic, batterie, basse et piano ensemble. C’est une façon de faire qu’il fallait que j’explore, et j’ai senti qu’il était temps ». En résulte un album où Gérald Genty s’expose, s’assume, à tous points de vue. Le fameux disque de la maturité ? Peut-être, car on n’en est plus à éviter les jeux de mots, mais à les intégrer totalement.

Car enfin, il fallait surtout des chansons. Et ça Gérald sait faire, plus que jamais. Bien sûr, l’amuseur, « l’entertainer » même qu’on apprécie sur scène est toujours là : on devine que

la carte postale « CherNobyl » est venue de la simple sonorité du mot. Il n’empêche, derrière les astuces et la mélodie guillerette se cache une certaine angoisse récurrente et malheureusement justifiée (« dans ma chair, un souvenir indélébile de la centrale »). Si quatre ans auront passé depuis la sortie de son précédent disque emmené par le magnifique Planeur, Gérald Genty n’imaginait pas qu’il se retrouverait réellement à frôler la mort.

S’il s’en est finalement sorti, la faucheuse a frappé, tout près. Difficile de ne pas évoquer ici la disparition subite à l’été 2022 de Pierre Van Braekel, cofondateur de son label, directeur artistique précieux, professionnel admiré et ami cher. Gérald a aussi perdu à quelques semaines d’intervalle son attachée de presse en Belgique Catherine Grenier, emportée quant à elle par une longue maladie. Un jeu de mot n’est pas toujours là pour être drôle, « Encore envie » ou « encore en vie » lui est dédiée, dit l’artiste qui suivait son combat : « elle avait encore envie, elle était forte, positive, courageuse, et ça n’a pas suffi... » regrette Gérald. « Cette chanson évoque le corps au combat. »

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